par Benoit Serre | 12 Jan 19 | abeilles
Trouver des solutions pour sauver nos abeilles…
(Journal de bord – hiver 2018)
Les abeilles se sont épanouies sur Terre bien avant nous. Pourtant, aujourd’hui, elles disparaissent.
Parfois jusqu’à 30 % des colonies perdues chaque hiver. En 2018, j’ai vu presque toutes mes ruches dépérir les unes après les autres ; une année terrible, humble rappel de la fragilité du vivant.
Quand la grappe devient trop petite
Certaines colonies déclinent sans raison apparente : la population chute, la grappe se rétrécit et n’a plus la masse nécessaire pour se tenir au chaud. Le froid finit par l’emporter.
Paysage, agriculture, prédateurs… l’homme a profondément modifié l’écosystème des abeilles.
Nos pratiques apicoles doivent évoluer en conséquence.
Mes premières mesures
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Nourrir au bon moment : sirop en automne, puis candi en plein hiver, toujours placé au contact direct de la grappe.
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Isoler les toits : limiter les déperditions de chaleur.
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Freiner les frelons asiatiques : pièges, muselières…
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Partitions isolées haute performance (PIPH) : modèle Marc Guillemain, dans les ruches les plus faibles pour réduire le volume à chauffer.
Une idée : la « couverture de survie » pour ruche
Malgré ces précautions, certaines colonies restaient exsangues. J’ai donc tenté d’envelopper les ruches trop faibles d’un isolant multicouche, façon couverture de survie.
Objectifs :
- Amortir les gelées matinales.
- Relancer la ponte grâce à un micro‑climat plus doux et agrandir la grappe.
Un pari contre l’humidité
Je connais le risque : davantage d’isolation peut retenir la vapeur d’eau. Mais je préfère une ruche humide… qu’une ruche morte.
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Seules les petites grappes (peu de vapeur) sont couvertes.
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Visite toutes les 1–2 semaines : au moindre signe de condensation anormale, j’ôte l’isolant et j’ouvre la grille d’aération.
À suivre…
L’hiver n’est pas terminé ; le verdict tombera dans les prochaines semaines.
Si cette idée fonctionne, elle offrira peut‑être une piste supplémentaire pour aider nos colonies à passer les hivers les plus rudes dans un monde qui change plus vite qu’elles.
Et vous ? Avez‑vous testé des méthodes d’isolation hivernale ? Partagez vos retours, ils seront précieux à toute la communauté.
par Benoit Serre | 30 Mar 18 | abeilles, Le Rucher du Marandou
« Quand le silence remplace le bourdonnement »
(Chronique d’un hiver noir – 2017 2018)
Le vent de février a balayé les dernières feuilles sèches autour de mes ruches – des boîtes muettes où la vie, jadis si dense, s’est éteinte presque sans bruit. Sur 140 colonies, 24 seulement ont survécu. Quatre ruches sur cinq ont disparu.
J’ai créé mon rucher en 2012.
Depuis, j’ai progressivement divisé mes ruches pour augmenter mon cheptel. En 2016, j’ai réussi à presque doubler ma production de miel après avoir doublé mon nombre de ruches. En 2017, j’ai donc beaucoup prospecté afin de créer un maillage de points de vente dans toute la Dordogne. Mon but est de proposer à mes clients toute une gamme de miels produits par mes abeilles et récoltés par mes soins en Périgord.
Pour mes abeilles et pour moi, l’année 2017 a été une année particulièrement difficile.
Le mois de mars très ensoleillé permettait d’espérer une belle saison apicole. Les pluies et les gelées d’avril ont impacté de nombreuses miellées printanières. Les mauvaises conditions climatiques qui ont perduré sur la floraison des acacias et des tilleuls, ont limité la sécrétion de nectar et le butinage des abeilles. Du 15 mai au 15 juin, comme l’année précédente, l’absence de nourriture a contraint les abeilles à consommer ce qu’elles avaient pu engranger précédemment et à subir une période de disette. Afin de rationner les
réserves de nourriture, les reines ont naturellement diminué leur ponte et favorisé l’essaimage. S’en est suivi un affaiblissement de la population d’abeilles.
Du 15 juin jusqu’au 25 juillet, de nouvelles sources de nourriture, comme le nectar de châtaignier et de ronce… ont permis aux colonies de se développer, de refaire leur stock de provisions et de remplir les hausses de miel. La production de miellat a été inexistante…
A l’entrée de l’automne, la population des colonies était très faible. J’ai nourri mes abeilles au maximum afin de leur garantir suffisamment de réserves pour passer l’hiver… Trop affaiblies, elles ont été assiégées et détruites par les frelons asiatiques, malgré le piégeage et la destruction des nids découverts.
Pour résister au froid, les abeilles ont besoin d’un milieu sain, de suffisamment de nourriture, ce qui était le cas. Mais il faut aussi que les populations soient suffisantes. Quand il fait froid, les abeilles se regroupent en grappes pour résister grâce à la chaleur que dégage la colonie. Mais cet hiver, mes ruches n’étaient pas suffisamment populeuses pour résister aux successives périodes de gel.
D’un cheptel de base de 140 ruches, je finis l’hiver avec seulement 24 ruches vivantes.
C’est-à-dire que 83% de mes ruches sont mortes suite à un effondrement progressif de leur population. C’est pour moi, à tous points de vue, une situation triste et alarmante. De nombreux apiculteurs amateurs ou professionnels sont dans la même situation. Aujourd’hui, je tente d’analyser l’ensemble des facteurs qui m’ont conduit à cette situation et cherche déjà des solutions pour que mes abeilles ne subissent plus jamais cela. Je veux être avant tout un berger hors-pair pour mes abeilles.
Au printemps 2018, pour la première fois, je vais acheter de nombreuses colonies d’abeilles et des reines, afin de reconstituer mon cheptel avant début juin. Si la météo et tous les autres facteurs sont enfin de notre côté, je pourrai peut-être sauver ma saison 2018 et garantir à mes abeilles un hivernage paisible dans de bonnes conditions. J’espère garantir également à mes clients et toutes les personnes qui nous soutiennent, une production abondante de miel de qualité du Périgord.
Benoit SERRE l’apiculteur du Rucher du Marandou.